Le Ladungswerfer léger Erhardt



Soldats allemands posant en France en 1915 avec un tout nouveau modèle de Minenwerfer auxiliaire léger.


Ce nouveau Minenwerfer d'un calibre de 91,3mm qui est décrit comme un lance-charges, et dont nous allons traiter dans ce sujet, fait partie de cette panoplie d'engins qui constitua ce que l'on appelle l'artillerie de tranchée allemande. Comme on a pu le voir dans de précédents articles tels que ceux en rapport avec les Mw. Lanz et Mauser, de nombreux engins ont été mis en œuvre peu de temps après le début des hostilités et ce afin de répondre aux nouvelles attentes qui découlent du changement de cap voulu par cette guerre. En effet, nul besoin de rappeler que les acteurs du conflit qui est en train de se jouer vont finir par s'enterrer peu à peu, rendant dès lors inefficace l'action de l'artillerie dite de campagne notamment. De ce fait, il était nécessaire pour l'Etat-Major allemand de repenser totalement la façon de faire la guerre et c'est pourquoi a été mise sur pied cette batterie de mortiers de plus ou moins bonne facture, dont notre fameux Ladungswerfer.



Atelier renfermant une multitude de matériels dont un Ladunsgwerfer.




I - UN MORTIER LEGER ORDINAIRE




Cet engin a été développé par l'ingénieur Heinrich Erhardt à la tête d'une firme implantée à Düsseldorf qui est très en vogue à cette époque, la Rheinische Metallwaren- und Maschinenfabrik dont les origines remontent à la fin du 19ème siècle, plus précisément en 1889.

Le Ladungswerfer leichter Erhardt, c'est son nom original, est un mortier de forme bien particulière arborant un poids de 39,5kg. Il se compose d'un tube de 91.3mm de diamètre monté sur un affût sur lequel sont visibles deux plaques accolées faisant référence à la dénomination du mortier et représentant ce qui peut être défini comme une table de tir.

Afin que soit au mieux stabilisé cet ensemble, le lanceur est monté sur une plateforme constituée de madriers munis de cornières et renforcée à sa base de lamelles d'acier qui permettront d'ancrer celui-ci plus facilement au sol lors d'une utilisation en terre meuble. En outre, sur l'avant et l'arrière, voire sur les côtés, sont disposées des poignées permettant son transport tandis que sont disposés à chaque angle des tubes pour la mise en place de bâtons afin de pouvoir porter à bout de bras ce mortier tel un brancard; système renforçant encore un peu plus le côté pratique, maniable, de cette pièce d'artillerie de tranchée. Par ailleurs, il est bon de rappeler qu'une caisse à accessoires ainsi qu'un écouvillon et son pot de protection sont rattachés à cette plate-forme.

Le pointage en hauteur de ce mortier est analogue à la plupart des Minenwerfers auxiliaires que nous connaissons. Il se calcule grâce à une alidade de tir qui se fixe à la base du lanceur et qui permettra de définir avec précision le degré d'orientation du tube qui coulissera grâce à un bras en arc de cercle solidement rattaché à l'affût et qui sera bloqué par une sorte de clavette. En outre, en ce qui concerne le pointage en direction, celui-ci s'effectue par rotation de l'affût même du mortier qui se meut de gauche à droite dans un espace compris entre - 14 et + 14 et qui sera bloqué cette fois-ci par un système de vis papillon.



Exemplaire de terrain d'un Ladungswerfer du système Erhardt.


Servi par un sous-officier et deux hommes, le Ladungswerfer léger de par son calibre tirait principalement les mines en fonte employées essentiellement par le Minenwerfer auxiliaire de type Lanz mais pas seulement. En effet, il pouvait être fait usage des projectiles dit "tuyaux de poêle" de 3,35kg apparus avec le lanceur Mauser ( pour en savoir plus sur ces projectiles, veuillez-vous référer à l'article en rapport avec ces lanceurs : Lanz / Mauser ).


Coupe 3D des projectiles de 91,3mm Lanz à fusée et à mêche.


Pour que le tir soit effectif, devait être placée à la base du mortier dans un tube fileté une étoupille à friction de même type que celle employée avec les Minenwerfers lourds et moyens de 24.5 et 17.5cm, mais également avec des modèles auxiliaires comme le Flügelminenwerfer entre autres.
Cette étoupille dénommée Reibzündschraube disposait d'une tête à forme octogonale dont l'une des faces pouvait supporter un marquage estampillé à froid.
Ce type de pièce était contenu par 55 dans une caisse en bois; une inscription à la peinture noire sur le couvercle ne manquait pas de le rappeler. Par ailleurs, sur la face interne de celui-ci, une imposante étiquette collée reprenait une photographie du mortier et permettait ainsi d'illustrer le placement de cette étoupille à traction tandis que des écrits indiquaient, entre autres, la firme de fabrication du dit lanceur ( Rheinische Metallwaren- und Maschinenfabrik, Düssendorf ) mais également le contenu de la caisse, à savoir 55 Reibzündschrauben für Ladungs.



Pour obtenir de meilleures performances et projeter ces projectiles encore plus loin, il arrivait que soit employé en plus un appoint de 5 grammes de poudre noire en guise de charge propulsive. De ce fait et pour éviter tout incident de tir, une attention toute particulière devait alors être donnée à l'entretien même du tube et ce afin d'éviter un trop important encrassement de ce dernier.
Dès lors, dans des conditions optimales et avec ce complément de charge, étaient atteintes pour le projectile Mauser des distances avoisinant les 150 mètres alors qu'avec le projectile Lanz à mêche, on obtenait une distance d'environ 190 mètres tandis qu'avec la variante à fusée, celles-ci pouvaient s'élever jusqu'à 210 mètres.

On est donc très loin de la portée atteinte avec le Glatter Leichter Minenwerfer Lanz qui avoisine les 400 mètres et c'est pourquoi la firme Rheinmetall a voulu se différencier de son concurrent en proposant la possibilité de faire usage d'une toute autre gamme de projectile, c'est d'ailleurs ce que nous allons voir dans ce prochain paragraphe !



Soldats allemands ayant installé en première ligne un Ladungswerfer leichter Erhardt
dans sa version simplifiée afin de faire usage de projectiles Lanz.



II - UN MORTIER BIVALENT




Ce qui fait l'intérêt de ce mortier, le leichter Ladungswerfer de type Erhardt qui apparait comme ordinaire au premier coup d'œil, est que ce dernier est convertible. En effet, un manchon peut être vissé sur la structure originale de son tube de lancement. A savoir que cette spécificité augmente considérablement la longueur de la bouche à feu et que de ce fait, cette rallonge cylindrique dispose à sa base d'évents permettant l'évacuation des gaz lors du tir.

Par ailleurs, cet ajout se complète par la mise en place de ce qui s'apparente à un piston amovible coiffé d'un plateau à griffe, c'est d'ailleurs ce système qui rend dès lors possible le tir d'un nouveau type de projectile mais c'est également ce qui est à l'origine de l'augmentation du poids de ce lanceur à 49,5kg, soit 10 kilos.



Hommes du L.I.R. 125 posant en Argonne avec un Ladüngswerfer léger équipé de sa charge spécifique de 5kg.


Cette nouvelle gamme de projectile se décline en plusieurs variantes et se présente sous forme d'une boite en tôle renfermant une charge explosive de grosse contenance.
Dans un premiers temps, seront utilisés des modèles de 3, 4 et 5kg mais les faibles distances atteintes ( respectivement 50, 37,5 et 35m ) vont pousser les initiateurs de ce projet à mettre au point durant l'année 1916 des charges réduites de 0,5kg ( soit des projectiles de 2,5, 3,5 et 4,5kg ) qui permettront dès lors d'obtenir une portée accrue. Ainsi, la munition de 2,5kg atteindra une distance d'environ 70 mètres, soit 20 mètres supplémentaires par rapport au modèle original; distance qui pourra être ré-évaluée à 150 mètres en faisant usage de l'étoupille à friction additionnée à la charge d'appoint de 5 grammes de poudre noire.

En outre, il est bon de préciser que ces projectiles qui ne sont en réalité que des charges explosives ( d'où la dénomination du lanceur ) sont employées avec détonateur et cordeau, cordeau qui doit donc par ailleurs être enflammé avant le départ du coup par le soldat lui-même.



Groupe de soldat présentant des munitions en tout genre ainsi que divers mortiers de tranchées dont un Ladungswerfer.








Sources:
- Note sur les engins de tranchée allemands par le Ministère de la Guerre - Septembre 1916
- Fascicule sur le lanceur de charges léger type Erhardt par Henry Bélot

Photographies:
- Archive et collection personnelle
- Ernest
- Association du musée du Mémorial 14/18 de Louches
- Pascal Casanova
- Jérémie Raussin



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