Les Eierhandgranaten



Soldats du I.R. 13 dans une tranchée de première ligne.
On notera la présence de différentes grenades dont une oeuf lisse sur la droite.


La Eierhandgranate, plus connue sous le nom de "Grenade Œuf", fait partie de ces munitions qui sont apparues durant l'année 1916, période à laquelle la guerre de position change petit à petit de visage pour rentrer dans sa phase initiale, à savoir la guerre de mouvement. Ainsi, de par sa petite taille et son faible poids, cette grenade va apparaître comme bien plus pratique pour les soldats, notamment dans les actions offensives auxquelles ils participent, que les grenades à manche et autres Kugelhandgranaten présentant de nombreux inconvénients dans ce genre de situation !

De ce fait, cette grenade "miniature" va être produite à grande échelle, c'est pourquoi une étude complète est intéressante afin d'en présenter les différentes variantes et les nombreux allumeurs qui l'équipent, sans oublier les accessoires, etc...




I - LA EIERHANDGRANATE, une grenade oeuf


Il n'est pas compliqué de comprendre d'où découle l'appellation réglementaire de cette grenade, sa forme ne laissant en effet guère de doutes. Peinte en noir ( brillant ), cette grenade d'environ 6cm de long pour 4.6 de diamètre pèse 318g dont 32 d'un mélange de poudre noire additionnée à du nitrate de baryte et à de l'aluminium. Cet explosif est défini par les allemands comme de la poudre K mélangée ( Füllung Mischpulver K ).

Deux modèles biens distincts vont voir le jour sans oublier les éternels exemplaires destinés à l'instruction, nous allons donc en décrire les caractéristiques dans les paragraphes ci-dessous.

A savoir que la grenade œuf fut utilisée par de nombreux alliés de l'Allemagne. Ainsi, l'Armée Austro-Hongroise ou encore la Bulgarie en fit usage.



Soldats bulgares munis de grenades dont des Eierhandgranaten.


               A) Le modèle lisse :




Apparue au début de l'année 1916 comme on a pu le voir, cette grenade ovoïde se compose d'un corps totalement lisse réalisé en fonte aciérée.

Ce modèle que l'on peut définir comme alter Art ( d'ancienne fabrication ) va être rapidement remplacé, au cours de son année d'adoption, par un nouveau modèle quelque peu différent.
Il est important de préciser qu'il arrive de rencontrer parfois de légères traces de ponçage au centre de la grenade ( caractéristiques déjà observées sur des grenades œufs lisses découvertes en étang ), cela ne veut de ce fait pas forcément dire qu'il s'agit d'un modèle à crénelage transformé par les faussaires pour être vendu plus cher, même si il faut bien entendu se méfier !


               B) Le modèle le plus courant :




Pour assurer une meilleure prise en main, que ce soit tant dans la phase d'arrachage du rugueux de l'allumeur que dans celle du lancer, ce nouveau modèle de grenade œuf fut produit de la même manière que le précédent à l'exception que dorénavant, en sa partie centrale, une ceinture fragmentée ( sillons plus ou moins prononcés selon les variantes ) est usinée.

Ainsi, ce nouveau projectile peut porter la dénomination de "Eihandgranate neuer Art schwarzes ei mit greifring" dont il n'est je pense pas nécessaire d'en donner la traduction.

Par ailleurs, contrairement au modèle précédent, il est possible de retrouver au cul de ces grenades des marquages faisant sans doute référence au moule employé par l'une des nombreuses fonderies fabriquant ces munitions. Ainsi, on recense plus d'une trentaine de marques composées de lettres parfois additionnées à des chiffres. Il arrive même parfois de rencontrer, bien que ce soit bien moins courant, un marquage de ce type frappé au sommet même de la grenade.

En outre, il faut savoir que cette grenade fut adoptée par l'Armée Yougoslave et donc produite également par celle-ci. Ces modèles sont la copie conforme des Eierhandgranaten allemandes et disposent donc de marquages au cul qui sont cependant bien souvent, ou tout du moins dans des proportions bien plus importantes que pour celles produites par l'Armée Impériale, complétés par des estampilles au niveau du sommet.
Pour la mise à feu de sa grenade, l'Armée Yougoslave équipa cette dernière d'un allumeur à percussion de taille plus imposante que ceux produits par l'Allemagne. De sa propre invention, ce dernier est réalisé en laiton et dispose d'un bouchon de protection vissé afin d'écarter tout incident durant le transport des munitions qui en sont coiffées. A savoir que ce bouchon peut également disposer de marquages.



               C) Les modèles destinés à l'instruction :




Comme pour toutes munitions ou presque, des grenades sont produites dans un unique but de former le personnel qui aura la tâche de s'en servir.
En effet, avant toute utilisation, le soldat devait suivre une formation lors de son arrivée au dépôt de recrues voire, si déjà engagé sur le front, dans un des nombreux terrains d'exercice éparpillés sur les arrières.

Deux grandes familles de grenades sont à différencier, le modèle de manipulation, ainsi que le modèle d'exercice, même si tous deux arborent une couleur rouge.

Le premier est un modèle tout à fait semblable à l'original. Il est fourni au soldat dans sa première phase de formation afin que ce dernier puisse se familiariser avec cet engin qui peut lui apparaître comme nouveau s'il n'est pas militaire de carrière. Ainsi, il lui permettra entre autres de s'essayer dans des premiers lancers tout à fait basiques.

Le second modèle est une grenade oeuf qui renferme une charge fumigène et qui dispose de 3 orifices à sa base. Son rôle est identique aux grenades à manche d'exercice que l'on connait et consiste à sensibiliser l'élève sur ce que peut représenter la durée du retard d'un véritable allumeur, lui permettant dès lors de mieux se rendre compte à quel moment la grenade risque d'exploser en situation réelle. Ainsi, lorsque le soldat actionnera la dite grenade, une légère fumée s'échappant des différents évents lui permettra d'analyser la trajectoire de cette dernière dans les airs lors de son lancer. De plus, l'élève tout comme son instructeur pourront apercevoir le point de chute du projectile et ce grâce à l'épais nuage de fumée provoqué par le dépotage de la charge.



Photo souvenir pour ces hommes ayant intégré cette école de formation au lancer de grenades.





II - LES DIFFERENTS ALLUMEURS


Soldat se préparant à lancer sa grenade oeuf sur les positions ennemies.
On notera que la fumée qui s'échappe est due au fonctionnement de l'allumeur.


Dans un premier temps, le filetage de cette grenade étant d'un diamètre identique à la Kugelhandgranate ( soit grenade boule ), la Eierhandgranate fut employée avec l'allumeur en alliage de zinc de cette grenade pour plus tard être utilisée avec une multitude d'autres modèles fabriqués exclusivement pour elle-même .

A savoir que ces allumeurs ( Brennzünder ) étaient tous montés avec une rondelle de cuir et ce afin que le chargement explosif de la grenade ne soit en contact avec une quelconque humidité qui pourrait entrainer un défaut de fonctionnement lors de l'utilisation de cette dernière.


               A) L'allumeur modèle 1915 :




Cet allumeur créé avant toute chose pour la Kugelhandgranate, comme il vient d'en être fait mention, va être réutilisé avec la grenade œuf. Il faut dire que l'armée allemande n'a pas lésiné sur les moyens et a sans doute surestimé le pouvoir destructeur de sa grenade boule qui apparait par ailleurs comme bien trop lourde, produisant dès lors cette grenade en masse dont les stocks d'allumeurs vont pouvoir être réemployés avec la Eierhandgranate dont le diamètre du filetage est identique.

Réalisé en alliage de zinc ( un ersatz en quelque sorte ), cet allumeur se décline en deux variantes, l'une avec un retard de 8 secondes, l'autre de 5 repérable par sa taille moins importante.
A noter qu'il est plutôt difficile de se tromper puisqu'une étiquette paraffinée collée sur le pourtour de la partie haute de l'allumeur renseigne sur le temps de ce retard et est de couleur rouge pour le plus faible! A savoir que cette dernière recouvre l'évent de l'allumeur par où s'échapperont gaz et fumée lors de son emploi.



Le rugueux qui le compose peut être constitué d'un fil torsadé ou encore se présenter sous forme de goupille même si cette éventualité est rarement rencontrée.

Pour faciliter le montage et démontage de cet allumeur sur la Eierhandgranate ( peu pratique à effectuer à la main ), fut mise au point une clef spéciale appelée Schlüssel dont la forme particulière permet de ne pas se tromper dans une identification. Il faut savoir que comme pour tout, des variantes existent. Ainsi on retrouve des clefs plus ou moins longues avec un écartement des "dents" plus ou moins important.



               B) L'allumeur modèle 1916 :




Bien que l'Armée allemande soit réticente à l'utilisation d'allumeurs à percussion, elle mit sur point un modèle de ce type pour la Eierhandgranate et ce dès la fin de l'année 1916, période à laquelle le projet de la grenade œuf devait être mis en œuvre puisque cette grenade fut adoptée au tout début de l'année 1917.

De forme bien particulière, cet allumeur réalisé essentiellement en acier est muni en sa partie basse d'un tube "détonateur" de même matière renfermant le retard et, en sa partie supérieure, d'un manchon en laiton, tous deux vissés. On retrouve au sommet de ce dernier une tête en forme de champignon incurvé à laquelle sont rattachés par l'intermédiaire de ce que l'on pourrait appeler une rampe hélicoïdale, une bille ainsi qu'un marteau.

Très bien pensé, le ressort du percuteur dont dispose ce modèle est au repos et ce jusqu'au moment de l'utilisation ce qui écarte tous types d'incidents plausibles et fait que l'Armée ait accepté d'adopter celui-ci d'autant plus que pour être actionné, une manipulation peu ordinaire est à effectuer. En effet, outre une traction, une rotation de la tête doit être faite au préalable. Ainsi lorsque l'on tire en tournant le bouchon de tête, le marteau est entrainé, ce qui comprime alors le ressort. Dès lors, il ne restera alors plus qu'à "attendre" que l'expulsion de la bille se fasse pour que le mécanisme entre dans sa phase terminale et libère ainsi le marteau provoquant dès lors l'inflammation de l'amorce et donc l'éclatement du retard et le fonctionnement de la grenade.

Par ailleurs, il est intéressant de spécifier que sur l'une des faces du corps de l'allumeur se retrouve estampillée à froid la date de production de ce dernier ( année surmontée de ce qui semble être le jour et le mois ) tandis que sur le sommet du champignon est marqué en relief le temps du retard ( à savoir 5 Sek. ) ainsi que ce qui doit être le code fabricant ( E.S.S. ).

Trop complexe à produire, l'allumeur modèle 1916 d'un retard de 5 secondes fut abandonné dès le début de l'année 1917 avec l'apparition d'un nouveau modèle, il peut donc être défini comme rare.
A savoir que les fabrications tardives de cette année sont reconnaissables par l'emploi d'acier et non plus de laiton pour le tube supérieur ( raréfaction de certains matériaux ) et par la suppression du creux au-dessus de la tête.


               C) L'allumeur modèle 1917 :




Réalisé en tôle emboutie, cet allumeur à retard de 5 secondes qui semble bronzé ( voire verni ou peint en noir ) dispose d'un cordeau tire-feu fait d'une ficelle ou d'une chainette d'acier se terminant comme pour les grenades à manche par une porcelaine de taille moins imposante cependant. A savoir que celui-ci est protégé par un capuchon de couleur feldgrau qui se visse et qui comprend sur son flanc une inscription à l'encre en rapport avec la date de production et à son sommet, en relief, un marquage faisant référence au fabricant ( fameux G.J.B. ) ainsi qu'au retard ( 5 Sek. ).

De même que pour l'allumeur modèle 1915, une clef spécifique était employée pour monter et dévisser l'allumeur de la grenade œuf. Ce dernier étant différent dans sa conception, une nouvelle forme fut donnée à cet accessoire bien particulier qui dès lors sera d'une taille légèrement plus importante même si sa forme reste essentiellement identique.



               D) Les allumeurs pour grenades d'instruction :




Outre l'allumeur ( Ubungszünder ) employé lors d'exercice avec Kugel qui peut être également utilisé avec les grenades œufs, on retrouve un autre modèle spécialement créé pour la Ubungs-Eierhandgranate.
Je n'ai jusqu'à présent pu observer aucun exemplaire sortant de collection ou provenant de découverte terrain, seulement le croquis ci-dessous le représentant. Ce dernier se présente sous la forme d'un tube disposant d'une étiquette paraffinée portant comme inscriptions vorsicht ! pulverladung ( "prudence ! charge de poudre" ) et surmonté d'un fil torsadé.


               E) L'utilisation de ces allumeurs :



Soldats allemands en formation manipulant des grenades dont des oeufs avec la fameuse plaque de poitrine.


Comme vous devez vous en douter, l'usage de ces doigts pour effectuer l'importante traction nécessaire au bon fonctionnement des allumeurs à friction est dépassé. Ainsi, une plaque de poitrine dénommée Brutstschild a vu spécialement le jour pour jouer ce rôle et rendre cette manipulation des plus ordinaires !

De forme carrée, cette dernière était maintenue au coup du porteur à l'aide d'une courroie réglable fixée à chaque extrémité sur l'un des deux orifices qui l'ornent aux angles sur tout son pourtour, ceci permettant que la plaque puisse être utilisée aussi bien par les droitiers que les gauchers. Du côté opposé, ce sont deux lanières qui sont rattachées à la plaque de la même façon mais qui permettront cette fois-ci au soldat d'effectuer une pression avec ses doigts ou, tout simplement, de la fixer au ceinturon afin de plaquer et stabiliser au maximum celle-ci lorsque de l'autre main est effectué l'arrachage du cordeau tire-feu de l'allumeur.



Bien évidemment et comme à chaque fois, on retrouve des variantes avec entre autres l'usinage d'une équerre de renfort ou non ( c'est le cas du modèle présenté au-dessus ) mais également la possibilité que les bords de la plaque soient repliés, c'est ce qui est visible sur le cliché ci-dessous avec ces hommes à l'instruction ( variante unique puisqu'observée sur cette seule photographie d'époque ).




En outre, il est possible de rencontrer un modèle bien différent de l'original puisque ce dernier, bien plus petit ( 11cm x 3.5cm ), est dorénavant de forme rectangulaire, son utilité en reste cependant inchangée.



Par ailleurs, il est important de rappeler que parallèlement à la mise en service de cette plaque, l'usage d'un crochet tire-feu développé à l'origine pour la grenade Kugel fut fait. Dénommé Abreissvorrichtung, ce dernier se présentait sous forme d'une lanière en cuir de 45cm de long pour 15cm de large se terminant par un mousqueton métallique.



De plus, il est arrivé que les soldats eux-mêmes mettent au point un système simplifié rattaché au ceinturon. Les hommes formant les troupes d'assaut ont ainsi employé ce genre de petit bricolage bien moins encombrant et dès lors beaucoup plus pratique dans une phase offensive de combat.


Vue d'un tel bricolage équipant Ernest Jünger du F.R. 73 en 1917 du côté de Regniéville.


Pour mieux illustrer nos dires, veuillez trouver ci-dessous une vidéo issue du fond cinématographique des archives centrales de l'Etat fédéral en Allemagne, la Bundesarchiv. Cette dernière réalisée à l'époque dans l'optique de former les futures recrues des troupes d'assaut, les fameuses Strumtruppen, nous présente les différents moyens permettant de faire usage de la grenade oeuf. Ainsi, on y retrouve l'emploi du bracelet en cuir et celui de la plaque. En outre, on peut également apercevoir que dans certaines conditions ( celles où ces accessoires précités ne seraient pas disponibles ), le soldat pouvait faire usage de techniques autres en utilisant tout simplement le bouton de sa bande molletière ou encore l'extrémité du fourreau de sa baïonnette.





III - LE CONDITIONNEMENT



Soldats sur le front des Vosges se préparant à faire usage de grenades oeufs et à manche.


Le dernier point à traiter dans cette étude sur la grenade œuf est on ne peut plus intéressant puisqu'il concerne le transport des grenades et de leurs allumeurs car comme on le sait bien, tous matériels envoyés au front en grand nombre étaient conditionnés de façon très différente, façon que nous allons dès à présent décrire !


               A) Les bouchons de transport :




Afin d'éviter tout incident durant le transport, les grenades œufs étaient équipées d'un bouchon en alliage de zinc ( zamac ), dénommé Verschluss-Schraube.
Fabriqué en grand nombre, ce type de bouchon se décompose sous des tailles assez différentes, variant cependant très légèrement. Sur le dessus de ces derniers sont apposés ou non des marquages divers en relief composés de lettres, chiffres et/ou points.

La forme de ces bouchons n'est pas innocente puisque comme on a pu le voir plus haut, une clef qui se présente sous différentes variantes permet le montage et démontage de ces derniers tout comme celui des allumeurs.
A savoir qu'il existe une fabrication simplifiée de ce modèle sans usinage de l'imposante rainure du dessus.

Par ailleurs, bien que beaucoup moins courant, un second modèle de bouchon de transport fut mis au point durant le conflit. Celui-ci dispose d'une base circulaire assez fine surmontée d'une tête carrée sur laquelle pouvaient être également estampillés divers marquages.



               B) Les boites pour allumeurs :




Pour les allumeurs modèle 1915, on retrouve deux types de conditionnement, l'un pour 10 unités, l'autre bien plus gros pour 50.
Par ailleurs, comme le démontre les boites découvertes dans des caisses de grenades Œuf, l'Armée allemande n'a fait que réutiliser les stocks d'allumeurs de Kugel qui lui sont restés sur les bras puisque cette grenade produite en masse fut très vite abandonnée au profit d'autres modèles bien plus performants et moins lourds.

A savoir que je n'ai pu observer que des conditionnements pour allumeurs à retard de 5 secondes, il faut donc croire que ces derniers étaient bien plus utilisés et finirent par remplacer le modèle à 8 secondes.

Le premier est donc une boite cartonnée de forme carrée renfermant 10 allumeurs. Son couvercle dispose de deux étiquettes. L'une d'elle, de couleur rouge, est de forme rectangulaire et nous fournit des indications concernant les conditions d'utilisation de ce modèle-ci d'allumeur à savoir, effectuer un geste vif pour l'arrachage du rugueux et non de faible intensité, ce qui pourrait entrainer un défaut de fonctionnement ( Zünder mit scharfem Ruck abziehen, langsames Abziehen ergibt leïcht Versager ). Sous cette dernière, on retrouve une autre étiquette de forme carrée et de largeur identique renseignant sur le contenu mais également le fabricant. On peut ainsi y lire 10 Stück Brennzünder für Kugelhandgranaten suivi d'une mention en rouge indiquant les secondes, pour enfin observer le fabricant, la ville d'emplacement ainsi que la date de production.
A l'intérieur, on retrouve à la base de la boite un système cartonné à section rectangulaire permettant le maintien des allumeurs en place, le principe étant de recouvrir un allumeur sur deux. A savoir qu'outre ce type de support, on rencontre également un système métallique à griffes !



Le deuxième conditionnement des allumeurs modèle 1915 s'effectue dans une grosse boite en tôle dont le couvercle dispose d'une étiquette blanche collée sur laquelle on peut lire dans un cadre à l'encre noire: 50 Stück Brennzünder für Kugelhandgranaten suivi, tout comme pour le précédent conditionnement, d'une mention en lettre rouge puis enfin, et pour la première fois, du système à croix qui se rencontre sur les caisses et renseignant à la fois sur le fabricant, le numéro de série de la boite ainsi que la date de production de l'ensemble.
A savoir que les allumeurs étaient rangés dans ce type de boite par 10 sur les supports à griffes.



Pour les autres allumeurs, je ne préfère m'étendre sur le sujet puisque je n'ai pu rencontrer jusqu'à présent aucun modèle 1916 ou 1917 dans leur conditionnement d'origine.


               C) Les caisses pour grenades :



Caisse de grenade oeuf positionnée dans une tranchée de première ligne allemande.



Le conditionnement des grenades œufs se faisait par 50 unités dans une caisse en bois spécifique munie d'un couvercle. Comme pour toutes caisses, de nombreux marquages à la peinture noire étaient apposés. Ainsi, on retrouve à l'arrière de cette dernière une mention nous indiquant qu'il est impératif de ne pas se débarrasser de celle-ci une fois vide mais de la renvoyer afin qu'elle soit réutilisée ( Leer zurück zur Kistenaufarbeitungesstelle = "A retourner vide à la centrale de traitement des caisses au pays" ); pas question à cette époque cruciale du conflit de gaspiller! En outre, est présente sur le devant de la caisse l'éternelle inscription sous forme de croix qui reprend le code fabricant, la date et le lieu de production ainsi qu'un numéro de série. Pour finir, sur l'extérieur du couvercle est notifié au centre, en gros et en toutes lettres, le type de grenades renfermées ainsi que leur nombre ( 50 Eier Handgranaten ), tandis que sont indiquées perpendiculairement sur les extrémités des mentions rappelant aux utilisateurs que la caisse doit être impérativement protégée de l'humidité et ne surtout pas être jetée ( Nicht werfen / Vor Kässe zu schützen ) !




Les grenades, pour ne pas trop être malmenées durant le transport, étaient disposées sur des rateliers en bois ( 5 par 5 sur deux étages ) positionnés sur la droite, tandis qu'à gauche, grâce à une séparation, était placé tout le reste ( allumeurs et accessoires divers ).



Morceau d'un ratelier découvert dans un souterrain.



Soldats allemands posant dans une tranchée où l'on peut apercevoir en arrière plan un ratelier avec grenades.


Par ailleurs, à l'intérieur du couvercle de cette caisse était renseigné dans le coin supérieur gauche ce qui semble être un code fabricant toujours différent de celui apposé à l'avant ( il ne faut pas oublier que le fabricant de la caisse est rarement identique à celui produisant les grenades ainsi qu'à l'atelier conditionnant le tout ) alors qu'est agrafée, ou cloutée, plus ou moins au centre, une imposante notice dont nous donnont la traduction plus bas et qui renseigne sur le contenu de la dite caisse, la mise en service des grenades, leurs transports, leurs lancers et l'entretien.



Grenade Œuf

( à allumeur 5 secondes ).

- > Eihgr < -

Contenu d'une caisse :


                50 grenades œufs remplies de poudre K mélangée et fermées par vis
                50 allumeurs
                 2 dispositifs arrache-feu
                 2 clés
                 2 modes d'emploi
                 1 plaque de poitrine ( pas dans toutes les caisses ).



MODE D'EMPLOI


I. Mise en service

     1. Prendre la grenade dans une main, vis de fermeture vers le haut.
     2. Dévisser le bouchon de fermeture à l'aide d'une clé et l'enlever avec son joint. Ne pas tourner la grenade afin de ne pas salir le pas de vis avec la poudre.
     3. Introduire, puis visser un allumeur de l'autre main en le tenant par ses ergots jusqu'à ce que celui-ci se trouve juste au-dessus du pas de vis. Serrer fermement à l'aide de la clé jusqu'à ce que les ergots soient en contact avec le corps de la grenade.

II. Transport

     1. Dans un sac de transport, un sac à pain, tout autre sac ou dans la poche.
     2. Si une plaque de poitrine est présente, passer la bretelle de suspension autour du cou en fonction du porteur : si droitier, l'extrémité de la tige arrache-feu vers la gauche, si gaucher, l'extrémité de la tige arrache-feu vers la droite. Les passants inférieurs de la plaque sont à attacher au ceinturon.
     3. La plaque de poitrine doit être portée serrée en l'ajustant le plus près de corps possible.
     4. Utiliser le dispositif arrache-feu avec une sangle tenue de la main amorçant la grenade.

III. Lancer de la grenade

     1. Arracher le cordeau de traction de l'allumeur.
     2. Après la mise à feu, lancer la grenade immédiatement et calmement.
     3. Dès la grenade lancée, se mettre à l'abri.
     Pour 1. Si la mise à feu se fait au moyen du dispositif arrache-feu ou de la plaque de poitrine :
           a) Avec dispositif arrache-feu. S'assurer que le dispositif ne soit pas trop serré pour qu'en cas de défaut (cordeau de traction récalcitrant) le dispositif puisse être ôté rapidement. Le mousqueton doit être passé dans le cordeau de traction de l'allumeur pour que celui-ci puisse être tiré sèchement dans le sens du détonateur.
           b) Avec plaque de poitrine arrache-feu. Passer le cordeau de traction dans la tige et tirer la grenade sèchement vers le bas.
     4. Toujours tenir la grenade et non l'allumeur lors de la mise à feu, sinon blessure de la main par gaz possible.

IV. Entretien

     1. Les caisses dont on aura extrait des grenades sont à protéger contre l'humidité par un stockage adéquat.
     2. Les bouchons allumeurs devront être protégés plus particulièrement. Leur efficacité est grandement influencée par l'humidité.
     3. Il est absolument interdit de toucher les cordeaux de traction des allumeurs avant utilisation des grenades sous peine de mise à feu prématurée.
     4. En cas de stockage de grenades déjà équipées de leurs allumeurs, dévisser ces derniers et replacer les bouchons à vis. Bien serrer ceux-ci afin d'éviter que la poudre ne s'écoule et ne prenne feu.
     5. Des bouchons-allumeurs entreposés plus de 5 mois (date sur la boite en tôle) devront être exclusivement réservés pour les exercices.


Bien évidemment, de nombreux fabricants ont participé à la production des grenades œufs et de tout ce qui s'y rattache, il n'est donc pas rare d'observer des différences succinctes d'un exemplaire de caisse à un autre selon la firme de production et l'année de fabrication. Ainsi, le système de poignée mais également l'apposition des marquages peuvent varier.

De plus, il est important de signifier qu'un autre type de caisse bien moins courant a été rencontré. Ce dernier semble avoir spécialement été produit pour des grenades montées avec des allumeurs modèle 1917 comme en atteste le marquage 50 Eierhandgranaten mit Brennzünder 17 sur le dessus.



Moins haute mais plus longue, cette caisse reprend les principales caractéristiques de la précédente et d'un modèle à un autre, quelques divergences sont à noter. Ainsi sur un exemplaire on retrouve la mention de 50 Eihand = granaten ( œuf au singulier et non plus au pluriel comme bien souvent avec Eier ) peinte sur le couvercle ainsi que l'apposition d'un trait rouge sur tout le pourtour supérieur de celle-ci dont je ne saurai donner la signification.




En conclusion, on peut dire que la Eierhandgranate est une grenade des plus intéressantes que ce soit pour le soldat en temps de guerre que pour nous passionnés. En effet, pour l'un cette munition de la taille d'un oeuf se présente comme très pratique puisqu'elle peut être envoyée facilement à des distances comprises entre 40 et 50 mètres permettant dès lors au lanceur de se trouver quasiment à l'abri de tout éclat; tandis que pour l'autre, la grenade oeuf est un sujet sur lequel on peut se pencher des heures durant puisque ce modèle-ci apparait comme très diversifié et ce même d'un point de vue de ses accessoires ou encore de ses nombreux allumeurs, et c'est donc un réel plaisir que de l'étudier.









Sources:
- Notice succincte sur les divers modèles de grenades actuellement en service dans l'armée allemande édité par l'Armée Française - Avril 1918
- Consignes de sécurité à observer dans la manipulation des munitions allemandes - USA 1918.
- Les grenades à main allemandes en 1918 par Anthony C. Medahl - Magazine allemand " Zeitschrift für Heereskunde " N°350/351 Juillet-Octobre 1990
- Les grenades allemandes de la Grande Guerre par Patrice Delhomme

Photographies:
- Archive et collection personnelle
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- Stéphan Lalisse
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- Mike Mondoggy ( USA )



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