L'Artillerie de tranchées Française




Mortier de 58 n°1bis accompagné d'un mortier Cellerier.


Dès les premiers mois du conflit, l'Armée française comprend très vite que l'Allemagne a su anticiper ce qui allait se produire, à savoir un conflit meurtrier avec l'éventualité d'une période de stabilisation durant les combats. Ainsi, elle semble tomber des nues lorsque s'écrasent sur ses troupes des projectiles à grande puissance explosive qui, outre leur coté dévastateur, joue un rôle négatif sur le moral des soldats. Dès lors, l'Armée va tout mettre en œuvre pour élaborer un moyen de riposte !

Pouvoir disposer d'un matériel simple, robuste, mobile et susceptible de lancer en tir courbe, à des distances relativement faibles, de grandes quantités explosives s'avère être la clef pour répondre aux Minenwerfers adverses mais pas seulement. En effet, il semble inévitable de mettre en place une série de pièces d'artillerie capable de créer des brèches et détruire l'important réseau de défenses accessoires dont l'Allemagne s'entoure, sans oublier la problématique liée aux difficultés de production, il faut ainsi mettre sur pied quelque chose de facile à fabriquer, pouvant être produit à des milliers d'exemplaires, voir des millions en ce qui concerne sa munition.



Ensemble de projectiles tirés mais non explosés, ramassés par des soldats allemands.
On apprend que près de 1500 munitions de ce type ont été tirées sur les lignes le 1er Juin 1916 au Bois-le-Prêtre.


L'Armée française décide alors de remettre en service une panoplie de matériels semblant venir d'un autre âge et qui peut s'apparenter à ce qu'on pourrait définir comme du matériel d'attente. En effet, elle fournit à ses soldats de vielles pièces d'artillerie datant du 19ème siècle comme par exemple, pour le plus connu, le mortier en bronze de 15cm équipant autrefois les places fortes, un peu comme à l'instar des Minenwerfers allemands malgré qu'ils soient plus modernes et surtout bien plus efficaces. On retrouve également de vieux canons dont les tubes seront traficotés pour en faire un semblable d'artillerie de tranchée, on pense notamment au lance mines Gatard.

Parallèlement à cela, on voit se développer de plus en plus des engins de fortune qui démontrent bien le souci de l'armée française à équiper ses troupes d'engins dignes de ce nom, auxiliaires de l'artillerie. On voit ainsi apparaître tout un tas de nouveau mortier issu de bricolages plus farfelus les uns que les autres mais qui vont rendre un service précieux aux soldats dans l'attente. En effet, le mortier Cellerier en est l'exemple type sans oublier l'emploi d'arbalètes, etc…



Groupe de soldats posant aux côtés d'engins de fortune au début de la guerre.
L'artillerie de tranchées est alors à son balbutiement.


D'importants essais vont être mis en place par les ingénieurs de l'Armée Française afin de mettre fin à l'infériorité dont elle fait l'objet, sans pour autant entraver la production des pièces d'artillerie en général qui reste elle-aussi primordiale. Bien que non concluant au début, des tests vont aboutir enfin à quelque chose de sérieux à la toute fin de l'année 1914, ce qui va permettre de voir arriver sur le front au début de l'année 1915, un véritable mortier de tranchée qui est susceptible de bouleverser les tranchées ennemies et de détruire les défenses accessoires adverses grâce à ses projectiles explosifs puissants : le mortier de 58.



Position dans une tranchée abritant le tout nouveau mortier de 58.


Ce mois de Janvier est le déclencheur d'un engrenage qui ne cessera de fonctionner et qui va ainsi permettre à l'Armée française de se composer un véritable petit arsenal dont la robustesse de certains de ces mortiers va faire naître un nom, qui même encore aujourd'hui, résonne dans nos oreilles, celui de Crapouillot! L'idée séduisante de pièces à âme lisse permettant le tir à faible vitesse initiale, et donc l'emploi d'engins explosifs à paroi mince et de grosse capacité, a été retenue d'autant plus que cette particularité de coefficient d'accélération diminué permet de faire usage d'explosifs chloratés, facile à obtenir industriellement. Les soldats vont alors voir déferler des mortiers réglementaires de tous types comme le 240 C, le 150 Fabry, l'obusier pneumatique Brandt et j'en passe…



Ensemble de projectiles pour mortier de 240 T.


Tout au long du conflit, l'Armée ne va cesser d'inventer mais également d'améliorer les pièces déjà en service afin de répondre aux caractéristiques que demande cette nouvelle face du conflit, celle de la guerre de tranchée. Ses efforts, sa persévérance, ont permis la réalisation d'une arme entièrement nouvelle dont elle n'a pas à rougir, l'artillerie de tranchée, cette artillerie lourde à faible portée qui, bien qu'au début fut improvisée, s'est perfectionnée au fils des années comme le démontre bon nombre de documents pris à l'ennemi et autres témoignages recueillis auprès de prisonniers.
Le général von Fleck aux commandes d'un groupe d'armées ennemies résume très bien la situation puisque dès 1915 il écrit : "Les Français qui étaient d'abord complètement dépourvus d'engins de tranchée, en ont fabriqué, n'ont cessé de les perfectionner et leur production n'a fait qu'augmenter jusqu'à ce jour. Au bout de quelques temps, ils ont été en mesure d'exécuter de fortes concentrations de feux et ont acquis la supériorité sur nous.".








Sources:
- Cours d'artillerie de tranchée par le Capitaine Bouchon, directeur des études au C.I.A.T - Janvier 1917
- Cours d'artillerie de tranchée par le capitaine d'artillerie Guillemin - Mai 1922
- Cours d'artillerie de tranchée par le Capitaine d'artillerie Lacuire, revus et corrigés - 1933

Photographies:
- Collection personnelle
- José Baugeard.



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